Le projet propose une approche architecturale privilégiant le déplacement du corps dans l’espace. La résidence prend racine dans la qualité spécifique du lieu d’intervention: une falaise rocheuse, aux limites de l’habitabilité.

La pente abrupte de celle-ci offrait cependant une opportunité de repenser le processus de conception et d’y introduire une dimension critique, malgré le contexte de la commande résidentielle, un approfondissement de l’approche au projet.

Le projet a été l’occasion de détourner subtilement certaines des structures spatiales très ancrées dans la culture du logis contemporain, en introduisant les contraintes du site comme une sorte « d’altérité » affectant la distribution des pièces. Le rapport oblique du lieu, la falaise rocheuse dessinant la baie de la ville de Baie-Saint-Paul, offre une opportunité, par le biais de la contrainte physique ou de la complexité de mise en œuvre d’un tel site.

Élaboré dès le départ en coupe, le projet se dessine avant tout selon un tracé organique préexistant de circulations sur le site, initiant une logique conceptuelle de parcours plutôt que d’un agencement de pièces découlant des composantes programmatiques.

L’ancrage des espaces se fait tout au long de ce tracé, privilégiant le mouvement constant de l’usager d’un niveau à l’autre selon une succession d’escaliers. Ceux-ci se déploient par séquences variées, par orientations multiples, afin de raffiner une qualité de parcours au sein des espaces tant intérieurs qu’extérieurs. Le mouvement est donc central, tant par sa présence au niveau de la conception du projet que dans la diversification des points de vue qu’il procure.

Ces escaliers, selon leur amplitude, permettent à la fois de rejoindre les différents paliers du site, mais aussi de créer une subtile distinction entre les espaces adjacents décloisonnés. En insistant sur le parcours plutôt que sur le programme, le projet s’installe dans la nature instable de l’habiter avec un corps toujours en mouvement, se détournant ainsi d’une planification d’espaces selon des conventions d’agencements programmatiques.

Le projet se fragmente ainsi en plateaux de vie, aux formes et orientations variées, maintenant une certaine réciprocité avec le sol environnant tout en positionnant la grande vue panoramique sur le fleuve comme un des points de vue d’intérêt sur le site.

La logique de circulation du projet se déploie donc depuis le haut du site où se situe l’accès principal, qualifiée par une loggia s’ouvrant sur le fleuve Saint-Laurent. Celle-ci permet du coup de traverser le bâtiment pour accéder aux terrasses faisant face au fleuve, et ce, sans nécessairement pénétrer à l’intérieur du bâtiment. Plus bas sur le site, en fin de parcours des escaliers et terrasses extérieures, un dernier lieu s’ouvre sur un plateau naturel, ceinturé par la falaise et ses grands pins centenaires.

Maintenant démultiplié par les parcours intérieurs et extérieurs longeant et traversant le bâtiment de part et d’autre, le projet, avant d’être une expression stylistique, est avant tout un prolongement d’un trajet en oblique préexistant sur le lieu. L’intervention architecturale maintient ainsi cette caractéristique du lieu comme seul véritable mode d’appropriation.

Le mode de construction de ce projet comporte une certaine spécificité. Bâti selon un mode d’auto-construction par les propriétaires, le bâtiment a été construit lentement, sur une longue période, laissant place à une grande part de flexibilité de conception en intégrant les propriétaires de façon consciente au processus. Cette situation a permis de laisser place aux questionnements sur leur mode de vie.

La mise en œuvre du projet sur le site s’est faite de façon progressive et délicate grâce à l’emploi de coffrages isolants permettant une séquence de coulées successives. Compte tenu de la difficulté d’appropriation de ce site où aucun arbre ne devait être abattu, le choix de cette technique de construction assurait le maintien des caractéristiques paysagères tant dans l’immédiat de la construction qu’à long terme.

Ce mode de construction robuste a permis de recourir à la maçonnerie de pierre afin d’arrimer l’expression architecturale à la qualité rocheuse de l’environnement. Conçue un peu comme une succession de petites collines descendant en cascade le long de la falaise, la volumétrie résultante du tracé des circulations renvoie au grand paysage de la côte Charlevoisienne.

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